Nous devons être à l'embarcadère, au Porto dos Tatus à 8 heures, c'est 10 minutes de bus depuis le Porto das Barcas, et qui se prend à 100 mètres de la pousada. Lever donc à 6:30, pour café da manha à 7 heures tapante. De toutes façons nous avons fort mal dormi: l'air conditionné était là surtout pour faire du bruit, il a donc fait très chaud :-(. Le café da manha est prêt, sauf les jus de fruits, dont on ne saura jamais s'ils arriveront un peu plus tard. Un peu avant 7:30 nous sommes partis et arrivons à l'arrêt de bus. Visiblement la ville est pleinement réveillée et active. Nous sommes quelques uns à attendre le bus (mais toujours les seuls touristes), 20 minutes plus tard le voilà. En route pour l'embarcadère.

Nous arrivons vers 8:10, sur la route avons croisés les veaux, vaches, ânes, cyclistes et autres motos usuels. Le bus nous dépose pratiquement au pied du bateau. Décidément nous avons de la chance :-). Nous localisons de suite Celio notre pilote et guide. Il nous fait acheter des bouteilles d'eau fraiche (bonne idée :-)), et nous aide à emmener nos bagages jusqu'au bateau. Surprise, nous nous attendions à un vieux rafiot de bois partager à plusieurs (et cela aurait eu son charme), c'est un bateau touristique rien que pour nous, avec deux places bien confortables, et un toit de toile pour nous abriter du soleil.

C'est parti pour près de 80 kms de trajet, qui nous prendront 3 bonnes heures, au travers du delta du Parnaiba. Balade bien sympa, nous serons contents d'avoir choisi l'option lancha rapide, lorsque nous croiserons des barques en bois, faisant le même trajet que nous, mais en 6 heures. Nous croiserons aussi 2 iguanes (ils les appellent aussi caméléons, c'est la version gris-vert qui se confond dans la végétation), des garças blanches et mauves, une "guara", sorte de garça toute rouge donc jolie dans le paysage, avec un très long bec, des crabes, et des sortes de poissons (en tous cas cela vit dans l'eau) qui se mettent à presque voler sur l'eau lorsqu'on les dérange. Finalement beaucoup de pêcheurs. Grâce à Celio, nous comprendrons qu'ile ne pêchent pas tous la même chose. Nous croisons d'abord des pêcheurs de crevette: il ont une boîte ouverte dans laquelle ils mettent de l'appât et qu'ils glissent dans l'eau. Les crevettes viennent manger l'appât et se retrouvent prisonnières. Simple, non ? Puis nous croisons un groupe, dont je pense d'abord que ce sont des baigneurs: ils ont de l'eau jusqu'au cou. Mais c'est parce qu'avec leurs mains sous l'eau il ramassent des coquillages. Les suivants sont des pêcheurs d'huitres, et finalement nous croiserons les pêcheurs de cajanguero (les crabes réputés de la région). Celio nous explique  qu'ils sont attachés par groupes de 40 crabes et c'est ainsi qu'il sont transportés et vendus, ce qui explique ce que nous avons vu sur les trottoirs de Parnaiba, mais aussi à Fortaleza au début du voyage. Il nous explique également que plusieurs fois par semaine ce sont 60 000 crabes (à moins que ce soient des paquets de 40 - Eh oui, on s'accroche pour comprendre le portugais ...) qui transitent par le porto dos tatus, et en provenance du delta.


Plus nous approchons de Tutoia, plus les berges s'éloignent. Nous finissons la dernière demi-heure dans la houle de mer. Nous comprenons alors ce que "delta en mer ouverte" signifie. En effet, le delta du Parnaiba est le plus grand delta en mer ouverte d'Amérique Latine, et l'un des 3 plus grands au monde avec le Nil et le Mekong. Ca veut dire qu'une partie des îles du delta se retrouvent carrément côté mer.

Finalement voici Tutoia. Côté mer, une grande épave de bateau. Nous contournons la péninsule pour arriver au port qui est abrité de la mer. Celio nous a indiqué qu'il a un pote qui demain peut nous amener à Aitins, porte d'entrée est des Lençois Maranhenses. On se laisse faire, d'autant que Celio est très sympa. Le port grouille de monde, pêcheurs, 4x4 à la recherche du touriste, et commerçants. Le bar du copain de Celio est à deux pas du débarcadère. Nous prenons un excellent jus de goyave, pendant qu'il téléphone à la pousada Jagata où il n'y avait plus de place hier. Miracle, il y a maintenant une chambre. Il nous propose de nous amener le lendemain à Caburé (d'où partent les lanchas pour Aitins de l'autre côé du rio) dans son 4x4 pour 250 reals, en passant par les plages. A 3 heures de trajet cela nous paraît honnête, on accepte. Dans le prix du trajet, il incluera le transport jusqu'à la pousada Jagata, pas plus mal, puisqu'elle est de l'autre côté du village (de l'autre côté de la péninsule, donc côté mer).

La chambre est super propre, l'air conditionné fonctionne sans bruit, et il y a la WIFI. Je vais pouvoir reprendre le blog ! Que demande le peuple ? Après la 1/2 heure d' Internet de rigueur, une sieste de deux bonnes heures compense le manque de sommeil de la nuit dernière.

Nous sortons donc vers 15 heures pour explorer le village. Nous retraversons la péninsule par la rue principale du village, qui est bien endormi à cette heures: 2 ou 3 chantiers de réparation / construction de maison - je ne voudrais pas être à la place des ouvriers -, 2 églises dont s'échappent des chants joyeux, et où le curé - à moins que ce ne soit un pasteur - harangue les fidèles qui se pâment de plaisir (on est proche du coitus non interrumptus, en plein après-midi !), des échoppes dont les persiennes sont à moitié fermées, on est peu à affronter directement les rayons du soleil. Les gens du coin, particulièrement les demoiselles s'amusent semble-t-il de mes "chaussures de schtrumpf" (faut dire que je ne les quitte pratiquement pas depuis Fortaleza, je vais peut-être démarrer une mode :-) ?). Nous arrivons côté port, où à l'animation de l'heure de notre arrivée a succédé l'encéphalogramme plat du milieu d'après-midi tropical. Nous trouverons même une rue piétonnière, au milieu de laquelle il y aura un bureau d'information touristique. L'employée qui parlait dehors avec ses copines, revient en courant pour nous renseigner. Notre question: où diner ce soir, la plonge dans un océan de perplexité. Finalement  elle nous mentionne une pousada devant laquelle nous sommes passés dans l'après-midi (je doute vu ce que j'en ai vu), et la rue piétonnière, où nous dit-elle à partir de 6 heures ce soir des terrasses apparaissent, dont une où l'on mange fort bien, à deux pas d'ici. Cela semble une piste à suivre.

Pour l'heure nous retournons de l'autre côté de la péninsule, par cette même rue principale, avec ses églises, échoppes aux persiennes à moitié fermées, etc. Nous avions repéré en bord de plage la pousada Embarcacao qui a une petite terrasse. Nous nous y arrêtons, commandons une bière, sympathisons avec un couple de brésiliens, ils sont de Belo Horizonte, lui parle quelques mots de français, se dit fasciné par la musique des nombres prononcés en français. C'est 555 qui régalera le plus son oreille :-). Au détour de la conversation nous découvrons qu'ils sont aussi à la pousada Jagata, dans la chambre juste à côté de la notre. Côté plage, un match de foot prend forme sur le terrain dans le sable. Retour vers la pousada, on va loquer un peu, prendre une douche, et s'attaquer à l'opération "Où bouffer ce soir".


Nous voilà donc repartis dans la nuit vers l'autre côté de la péninsule. Les magasins sont maintenant ouverts, et les deux églises fermées. Ce n'est pas plus mal. D'autre part pas mal de gens sont à leur porche ou celui de leur voisin le long de la rue principale, les choses semblent bien se présenter. Arrivés sur la rue piétonne, effectivement des tables sont apparues en terrasse, et certaines sont mêmes occupées. Nous nous installons. Initialement il nous faut négocier la caipirinha (étaient-ils à court de Cachaça ?), mais tout rentre bientôt dans l'ordre. Autour de nous l'animation monte.

Nous commandons une Camaraonada (nous voulions una moqueca de peixe, mais le garçon nous apprend qu'il n'y a pas de poisson ce soir). Ce sera un grand succès, préparée au lait de coco, servi avec du riz juste bien cuit pour pouvoir "boire"  le lait de coco, ainsi qu'une autre sauce dont nous ne saurons bien définir le contenu, à part qu'il doit y avoir de la tomate. En tous cas un régal, et le tout pour ... 45 reals (nos deux caipirinhas chacun comprises). J'imagine qu'on ne fera pas mieux de tout le voyage. D'autre part autour de nous l'animation continue de monter, les minettes en mini-jupes et chaussures argentées arpentent le trottoir, il y a de la drague dans l'air. A part le couple de brésiliens que nous avons rencontrés dans l'après-midi, il semble que tous les autres sont des gens du cru: ça vit fort bien Tutoia le jeudi soir :-). J'oubliais, il y avait même un grand écran, où un DVD passait un concert d'un chanteur dont j'imagine qu'il est à la mode, pour des gens qui dinaient en plein air à Sao Luis. Amor, corazon et ses synonymes tous les deux mots. Comme c'est sous-titré en portugais, cela nous fait travailler la langue. Nous rentrons fort satisfaits et repus, le long de la rue principale les gens sont toujours dehors et papotent, jeunes et moins jeunes. Décidément, Tutoia nous surprend positivement :-).